L'écologie politique a vécu en France, le 28 juin 2020, un grand moment.
Le succès des listes vertes au niveau municipal, tant dans les grandes métropoles, que dans des villes bien plus modestes, témoigne d'une prise de conscience sans précédent, des citoyens de ce pays.
Désormais il sera difficile de récupérer, avec des mots et quelques débauchages, l'aspiration des Français à vivre sainement dans une planète préservée.
L'exécutif actuel, paralysé par la peur de déplaire aux grands lobbies industriels, s'est jusqu'ici contenté de discours, de postures et a eu le culot de se présenter comme un modèle sur la scène européenne.
En réalité, la France est le mauvais élève de l'Europe, elle n'atteindra, à la fin de ce quinquennat, aucun des objectifs qu'elle s'était fixée.
Pourquoi ?
Dans le monde entier, les investissements, publics ou privés, dans les projets "verts", explosent. Au niveau de l'énergie, des transports, de la construction... les réalisations innovantes et rentables foisonnent. A très court terme, les coûts de production dans ces domaines seront nettement inférieurs à ce qu'ils sont aujourd'hui.
Le retard que nous avons pris ces dernières années sera extrêmement difficile à rattraper. Nos chercheurs et ingénieurs, découragés par l'inertie française, vont à l'étranger faire valoir leurs talents. Cette fuite de cerveaux, que nous avons mis plus de 20 ans à former, est un gâchis sans nom.
Depuis plus de 30 ans, la France, conduite par de médiocres dirigeants, s'est assoupie. Elle végète dans un conservatisme pantouflard, gangrené par un corporatisme délétère. La jeunesse se détourne massivement des partis politiques.
Aujourd'hui, cette jeunesse a une grande cause dont elle devrait se saisir, celle de l'écologie, de la préservation de la planète et de sa biodiversité. En votant certes, mais aussi en investissant les associations, les comités de quartiers dans les villes, en multipliant les initiatives citoyennes, en interpellant les élus sur des problèmes concrets, en faisant valoir leurs propositions.
Les lobbies, dont je parlais plus haut, ne se privent pas, eux, de faire constamment pression sur nos représentants ; ne leur laissons plus le champ libre.
Agissons, non pas en bloquant, en cassant, en hurlant des slogans, mais en argumentant, en expliquant, en mobilisant... en étant convaincants.
Alors que jusqu'ici l'inaction et le renoncement ont caractérisé la politique "Macron" dans le domaine de la transition écologique (ce qui a conduit le Conseil d'Etat à prononcer une lourde sanction contre nos gouvernants), le WWF France (avec l'appui du cabinet Ernst & Young) a pris le taureau par les cornes.
Il publie un rapport détaillé (rapport « Monde d’après : l’emploi au cœur d’une relance verte » qui montre :
"qu’accélérer la transition écologique par une relance verte et dans des secteurs clés permettrait de soutenir plus d’un million d’emplois d’ici la fin du quinquennat."
Rénovation énergétique des bâtiments, développement des énergies renouvelables, soutien à l’électromobilité, aux transports en commun et au vélo, promotion de l’agriculture bio ou encore du tourisme vert, toutes ces pistes sont explorées.
A l'aide de graphiques très clairs, ce rapport compare les effets de trois choix politiques : le maintien sur la trajectoire actuelle (scénario tendanciel), un scénario qui respecterait les engagements pris (jusqu'ici jamais tenus !), et le scénario d'une "relance verte". Les résultats sont éloquents !
" Le gouvernement est face à un choix historique : placer l’emploi durable au cœur d’une relance verte ou enfermer l’économie dans un modèle non soutenable."
" Cette étude témoigne qu’une reconstruction visant à accélérer la transition écologique de la France peut profiter à l’emploi, à travers notamment la rénovation énergétique des bâtiments, le développement des énergies renouvelables, de l’électromobilité, des transports en commun, ou encore du tourisme vert.
En portant ces mesures dans le cadre d’une « relance verte », plus d’1 million d’emplois verts pourraient être soutenus à travers toute la France d’ici 2022, soit la fin du quinquennat d’Emmanuel Macron, tout en permettant au pays d’accélérer sa transition.
A plus long terme, trois fois plus d’emplois pourront être soutenus si l’on mise sur les secteurs de la transition écologique et que l’on ne se contente pas du « business as usual ». Cette relance verte devra être le point de départ d’un investissement à la hauteur des besoins et dans la durée pour les secteurs de la transition et l’accompagnement des salariés."
WWF - France
Je m'efface devant le dernier appel de la plus grande revue scientifique au monde : Nature.
Une nouvelle fois, comme je le fais modestement sur ce site depuis des années, elle sonne le tocsin et surtout elle montre chiffres et graphiques à l'appui, le peu de progrès réalisés ces dernières années.
Notre pays en particulier, ne tient aucun des engagements pris à la fameuse COP 21.
Il est très facile de se peindre en vert, comme le font notre président et quelques autres, de donner des leçons, alors que l'on se croise les bras.
La canicule qui a frappé la France et d'autres régions d'Europe fin juin, qui a vu tous les records de température pulvérisés sur tout le continent a été étudiée en quasi temps réel par un groupe de climatologues.
Le résultat est sans appel : le fait que le changement climatique soit responsable des températures atteintes en France, en juin, est au moins cinq fois plus probable que toute autre cause naturelle.
VOIR : Comment savoir quand le réchauffement climatiques est à blâmer
Dans son éditorial du 15 septembre 2019, Nature explique pourquoi elle se joint à plus de 250 médias pour le Covering Climate Now, une collaboration unique visant à attirer l’attention sur la nécessité d’une action urgente.
La revue rappelle que des scientifiques du monde entier se joignent aux grèves pour lutter contre le changement climatique.
" De Bangkok à Brisbane, les chercheurs ont été parmi ceux qui ont protesté pour réclamer une action urgente contre le réchauffement climatique."
Car, pour une fois, il y a une quasi unanimité des scientifiques pour reconnaître que le réchauffement climatique a pour origine l'activité anthropique.
L'action des Trump, Bolsonaro et consorts, n'est rien d'autre qu'un crime contre l'humanité, car s'ils étaient suivis, c'est la vie sur terre qui serait menacée à brève échéance.
VOIR le dossier sur The Guardian
Le temps des paroles est donc passé.
Partout les jeunes se lèvent pour presser leurs aînés d'agir. Hier, dans 150 pays, des manifestations monstres ont eu lieu pour protester contre l'inaction des politiques (*).
La semaine prochaine, à New York, s'ouvre le sommet mondial sur le climat. Souhaitons que l'appel des jeunes et des scientifiques de tous pays soit entendu.
(*) Il est déplorable qu'hier à Paris, l'alliance-jaune/noir des populistes, corporatistes et nihilistes, ait pollué cette manifestation.
Dès l'inauguration de ce site, il y a plus de 10 ans, j'ai attiré l'attention de mes lecteurs sur le désastre qui se préparait pour le vivant, sur cette planète.
Depuis, la situation a empiré dramatiquement, au point qu'aujourd'hui, dans son éditorial, le très sérieux quotidien "Le Monde" écrit :
" La planète s’achemine vers la sixième extinction de masse. Et celle-ci risque de se produire non plus à l’échelle des temps géologiques, mais en quelques décennies seulement. Avec un unique responsable : l’homme."
La communauté scientifique s'accorde sur cette sombre prévision. Tous les articles que j'ai pu consulter depuis 10 ans, notamment dans les plus prestigieuses revues scientifiques, aboutissent au constat, qui est validé par la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES).
Dans le rapport, adopté ce 6 mai à Paris, à l'issue de la 7ème session plénière de l'IPBES, on peut lire en effet :
« La nature décline globalement à un rythme sans précédent dans l'histoire humaine - et le taux d’extinction des espèces s’accélère, provoquant dès à présent des effets graves sur les populations humaines du monde entier. »
Ainsi, ce miracle qu'est la vie, fruit d'une rencontre de hasard et d'une évolution de nécessité, aboutissant à la merveilleuse machine pensante qui est l'homme, mais aussi, et surtout, à cette prodigieuse organisation de la chaîne du vivant, où chaque maillon est essentiel pour la survie de l'ensemble, est désormais menacé par l'insondable bêtise de sa créature.
Si les revues scientifiques que j'évoque plus haut investissent désormais le champ politique qu'elles avaient toujours ignoré, en s'attaquant vigoureusement au grand guignol qui préside le plus puissant pays du monde, c'est que celui-ci fait des émules : Bolsonaro au Brésil qui veut détruire la forêt amazonienne (et les derniers indiens qui vont avec), mais aussi l'extrême droite européenne et leurs supporters populistes, qui gardent les yeux rivés sur le cadran de la pompe quand c'est le cadran solaire qui devrait affoler le monde.
Mais ce sont tous les dirigeants actuels qui devront rendre compte, un jour ou l'autre, de leur coupable inaction.
Le notre au premier chef, qui se peint en vert en toute occasion à l'étranger, et qui chez nous est aussi frileux que tous ses prédécesseurs.
La revue scientifique "Nature" s'est penchée sur ce rapport et en a extrait les points les plus marquants :
- " Nous érodons les fondements mêmes de nos économies, de nos moyens de subsistance, de notre sécurité alimentaire, de notre santé et de notre qualité de vie",
-environ 75% des terres et 66% des zones océaniques ont été «considérablement altérées» par la population, principalement en raison de la production d'aliments.
- Les activités agricoles sont également parmi les principaux contributeurs aux émissions humaines de gaz à effet de serre . Elles représentent environ 25% des émissions totales
- l'abondance moyenne des plantes, animaux et insectes indigènes a diminué d'au moins 20% dans la plupart des principaux écosystèmes depuis 1900
- 5% de toutes les espèces seraient menacées d'extinction par un réchauffement de 2°C au-dessus des niveaux préindustriels - 16% si l'élévation de la température mondiale moyenne dépassait 4,3 ° C. "
La population mondiale approche aujourd'hui des 8 milliards d'habitants. Si chacun d'eux avait notre niveau de consommation, les ressources de la planète n'y suffiraient pas. Or les projections validées par l'ONU prévoient près de 10 milliards d'habitants en 2050...
Ressources pillées, biodiversité gravement altérée, pollutions majeures, climat déréglé... l'avenir de l'homme sur la Terre s'avère très sombre !
L'anthropocène, qui commence au moment où les activités humaines ont eu un impact sur l'écosystème terrestre, risque de se terminer sur un désastre.
Il n'est donc pas difficile de comprendre que notre modèle économique actuel est obsolète. Et pourtant nos dirigeants continuent à garder "les yeux grands fermés".
Pire, alors que 97% des publications scientifiques dans des revues reconnues (ayant un comité de lecture) admettent qu'il n'y a aucun doute sur l'origine anthropique du dérèglement climatique et que celui-ci aura à court terme des effets directs et collatéraux cataclysmiques, des lobbies puissants, se cachant derrière les derniers climato-sceptiques, ont aujourd'hui le vent en poupe, grâce à des fripouilles façon Trump.
La révolution industrielle, agricole, économique... ne passera pas par des élus court-termistes, sans courage, obsédés par leur réélection.
L'accord de Paris aussitôt signé, aussitôt oublié par les états, a néanmoins donné un signal fort aux investisseurs qui, eux, ont des informateurs fiables. On peut le déplorer (c'est mon cas), mais le nerf de la guerre - l'argent - est chez eux.
Le principal espoir pour le développement durable réside donc dans les initiatives des grandes entreprises, des organisations mondiales et européennes non gouvernementales, dans les réseaux de multitudes de PME ou TPE qui émergent un peu partout (*).
Alors, si notre action en tant que citoyen devient inopérante, agissons avec notre portefeuille. En tant que consommateur nous avons l'arme fatale.
Refusons d'acheter des fruits et légumes monstrueux, gavés d'engrais et de pesticides - ou ayant parcouru des milliers de kms avant de finir dans nos assiettes - n'achetons plus de véhicules qui nous empoisonnent, refusons d'acquérir des smartphones à plus de 1000 euros où l'innovation est nulle, soyons attentif à la durabilité de ce que nous achetons...
Bref, actons que l'économie linéaire : extraire, produire, consommer et jeter, a fait son temps et soutenons activement l'avènement de l'économie circulaire, des énergies renouvelables, de la construction durable, des transports propres, d'une nouvelle gestion de l'eau qui passe par une agriculture biologique.
Ce souhait n'est pas celui d'un écologiste fumeux ou exalté, il s'inscrit dans la froide analyse de chiffres implacables.
(*) Que pouvons aider en choisissant et interpellant les élus de proximité (municipalité, intercommunalité et région) qui peuvent soutenir localement le développement durable.