Le rôle des femmes dans l'aventure scientifique est mal connu et souvent occulté ou minimisé.
Dans les travaux autour de la structure de la matière, malgré toutes les difficultés liées à la misogynie ambiante en cette première moitié du XXème siècle, elles furent pourtant présentes.
On connait bien sûr l'histoire de Marie Curie, seule scientifique titulaire de deux prix Nobel scientifiques (physique et chimie), première femme professeur titulaire à la Sorbonne, qui vécut un temps dans l'ombre de son mari.
Marie Skłodowska-Curie eut à souffrir en tant que femme et "qu'immigrée" (elle est née en Pologne) d'une double discrimination.
Sa liaison (après le décès de son époux) avec le physicien Paul Langevin, déchaîna la presse d'extrême droite qui réclamait son renvoi en Pologne.
Elle ne put être reçu à l'Académie des Sciences (il fallut attendre 1979 pour voir une femme à l'Académie des Sciences !).
Ce n'est qu'en 1995 que ses cendres (avec celles de son mari) rejoignirent le Panthéon. Elle y fut accueilli par François Mitterrand, alors à quatre mois de son départ de l'Elysée.
Son travail sur la radioactivité est reconnu. Elle apporta aussi sa pierre - avec son époux - à la construction du tableau périodique des éléments, puisqu'elle en découvrit deux : le polonium (1898) et bien sûr le radium (1898).
LIRE sur le site : Mendeleïev, un tableau de maître
Mais ce ne fut pas la seule, par exemple la chimiste Ida Tacke-Noddack a découvert le rhénium avec son mari (1925).
Qui connait Marguerite Perey, physicienne française considérée comme l'unique découvreur de l'élément 87, le francium, en 1939 ?
Préparatrice de Marie Curie, elle obtint ensuite (en 1949) la chaire de chimie nucléaire à l'université de Strasbourg et fut la première correspondante de l'Académie des Sciences (1962).
Qui connait Stefanie Horovitz, une chimiste juive polonaise, qui apporta, en 1914, les preuves expérimentales de l'existence d'isotopes du plomb. Elle mourut en 1942 dans le camp de concentration de Treblinka.
C'est Frederick Soddy qui obtint seul le prix Nobel en 1921 pour " ses recherches à propos de l'origine et la nature des isotopes "
J'ai parlé sur ce site de l'aventure de la fission de l'atome et de la construction de la première bombe atomique :
Science et Conscience : à propos du projet Manhattan
C'est Lise Meitner qui fut historiquement la première scientifique à expliquer et nommer la fission nucléaire. Bien qu’ayant publié son rapport peu de temps après son « patron » et futur prix Nobel Otto Hahn , on lui reconnaît l’antériorité de la découverte.
Lise Meitner a étudié la physique à l’université de Vienne avec Ludwig Boltzmann. Après avoir obtenu son doctorat, elle rejoint, en 1907, le physicien Max Planck et le chimiste Otto Hahn. La montée du nazisme pousse Lise Meitner, qui est juive, à l’exil. En 1938, elle rejoint la Suède..
Et pourtant, en 1944, Hahn reçoit seul le prix Nobel de chimie. Cette injustice est partiellement corrigée en 1966, lorsque Hahn et Meitner reçoivent ensemble le prix Enrico Fermi avec Fritz Strassmann.
L'élément 109 se nomme meitnérium en son honneur.
L' effet Matilda (*) s'applique parfaitement à l'histoire de cette femme exceptionnelle.
(*) Désigne le déni ou la minimisation récurrente, sinon systémique, de la contribution des femmes scientifiques à la recherche
La revue Nature relate le parcours de quelques unes de ces femmes remarquables, qui restèrent vent debout contre tous les préjugés de l'époque, pour apporter leur pierre à l'histoire des sciences dans le domaine de la structure de la matière.
On peut être très belle, très sexy... mais aussi très intelligente (voir Marilyn) et pire se passionner pour la science, les technologies et les expériences en laboratoire.
C'est le cas de Hedy Lammar (Hedwig Eva Maria Kiesler, rebaptisée ainsi par le producteur nabab Louis B. Mayer,) élue plus belle femme du monde dans les années 1940, et chercheuse de génie.
Avant de quitter l'Autriche pour les USA, à la fin des années 30, elle s'était imposée en véritable sex symbol à 18 ans en tournant Extase (1933) de Gustav Machatý, où les spectateurs pouvaient la voir nager et courir nue.
Elle tourna une trentaine de films, dont certains avec de grands metteurs en scène, et fut évidemment une grande séductrice.
Ce n'était pas une scientifique de salon puisqu'elle est créditée, en collaboration avec le compositeur et pianiste George Antheil, de l'invention d'un système de codage des transmissions par étalement de spectre (« technique Lamarr »), ancêtre des techniques toujours utilisées actuellement pour les liaisons chiffrées, la téléphonie mobile ou la technologie Wi-Fi.
Un film documentaire (" Hedy Lamarr, From Extase to Wifi ", 2017) lui a été consacré. Elle a quitté paillettes et blouse blanche le 19 janvier 2000.
Voir aussi : https://youtu.be/fvZBNSxuSuo