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La tragédie des femmes musulmanes

En arrière toute !

« Je chante pour les femmes qui n’ont pas de couronnes/Et qui se battent pour qu’on ne couvre pas leur tête. » 

Souad Massi

 

A Leïla, Latifa, Ouaffa, à la mémoire de Lina Ben Mehnni

et à toutes les autres

 

Un article du journal Le Monde de ce jour, consacré à la remarquable chanteuse franco algérienne Souad Massi, m'a culpabilisé.

 

Comment se taire face à cette scandaleuse régression du statut des femmes dans le monde musulman, et singulièrement au Maghreb, quand on a été témoin dans les années 70-80 de leur fol espoir d'émancipation.

 

Dans ce portrait de Souad Massi on peut lire notamment ceci :

 

A 50 ans, après une tragédie familiale qui aurait pu l’abattre, la chanteuse Souad Massi, égérie d’une double culture apaisée, continue d’exprimer sur scène la défense des droits et libertés des femmes.

 

Je ne serais pas arrivée là si…

 

… Si je n’étais pas née à Bab-El-Oued, le quartier le plus populaire et métissé d’Alger, entourée de femmes aussi fascinantes qu’invisibles.

 

Pourquoi « invisibles » ?

 

Parce que c’était une société d’hommes ! Où les règles étaient faites par les hommes, pour les hommes, et à leur seul bénéfice. Les femmes, petits êtres inférieurs, n’étaient là que pour les servir. Leur sort était joué à la naissance, leur sexe les condamnait à un destin de recluses. Pas de sorties, pas d’éducation, pas de liberté, pas de vie publique. Elles étaient des oiseaux en cage.

 

Vous en aviez conscience, petite fille ?

 

Ah oui ! Et la perspective de devenir moi-même, un jour, l’un de ces oiseaux entravés me terrifiait. Je passais tout mon temps, enfant, avec ces femmes de ma famille et nos voisines, que je trouvais magnifiques et talentueuses. J’écoutais les conversations, j’observais les regards. Ce qui me frappait, c’était la tristesse et la mélancolie de ces femmes. Cela me semblait injuste. Et cette différence avec la liberté des hommes m’était incompréhensible."

 

Plus loin, elle s'écrie :

 

"la seule issue, pour exister, c’était d’avoir un statut, de faire des études et de prendre un vrai métier de mec, ingénieur en génie civil, dans le bâtiment, comme les hommes. Je devais me surpasser pour devenir leur égale. Il ne me faudrait pas longtemps pour comprendre que rien n’y ferait : une femme a beau être ingénieure, médecin ou juge, elle garde toujours son statut de mineure − sous la dépendance de son père, de son frère, voire de son plus jeune frère, tant qu’elle n’est pas mariée, puis sous la coupe d’un mari. Quelle folie !

 

Souad Massi s'est réfugiée en France, a épousé un homme éduqué qui finit par la tromper. La suite est un drame abominable. Voila ce que l'on pouvait lire dans la presse en mars dernier :

 

"Abdellatif Z, l’ancien mari de la chanteuse Souad Massi, a été condamné samedi à 15 ans de réclusion criminelle pour avoir tenté d’assassiner leurs deux filles, alors âgées de 6 et 11 ans.

En 2017, ne supportant pas que sa femme demande le divorce, l’homme avait profité de l’un de ses déplacements pour faire avaler des médicaments aux enfants et ouvrir une bouteille de gaz.

Les petites victimes avaient été retrouvées inconscientes par les secours, avant que leur père n’ait eu le temps de mettre le feu à l’appartement."

 

" A l’audience, pourtant, j’ai eu l’impression qu’on faisait mon procès. Un homme qui travaille, c’est normal. Un homme qui voyage pour ses affaires, c’est admirable. Mais une femme… Une femme, comme moi, qui quitte parfois la maison pour ses obligations professionnelles, qui fait vivre le foyer, qui a des responsabilités, eh bien c’est avant tout une « absente ». Elle manque à ses obligations élémentaires de mère, elle est forcément défaillante. Au fond, tout est de sa faute. Cet opprobre jeté sur la femme libre m’est apparu comme l’injustice suprême."

 

Désespérant !