Parlez-moi d'humour...

     Il n’y a pas de comique en dehors de ce qui est proprement humain.

     Henri Bergson

 

Parlez-moi d'humour !

Redite moi des choses drôles ! Je ne suis pas las de les entendre...

 

On peut tout dire avec humour, aborder tous les sujets : la mort,  l'amour... et même le nazisme (Chaplin, Le Dictateur) ou les camps de concentration (BenigniLa vie est belle).

 

« Le rire est la politesse du désespoir. Si le rire sacrilège et blasphématoire que les bigots de toutes les chapelles taxent de vulgarité et de mauvais goût, si ce rire-là peut parfois désacraliser la bêtise, exorciser les chagrins véritables et fustiger les angoisses mortelles, alors oui on peut rire de tout, on doit rire de tout : de la guerre, de la misère et de la mort ! D’ailleurs est ce qu’elle se gêne la mort, elle, pour se rire de nous ?  »

 Pierre Desproges

 

Je me méfie des hommes sans humour.

 

Les dictateurs sont sinistres (ou alors involontairement comiques). Les comiques sont bannis des régimes totalitaires.

Car le Rire est subversif, parfois révolutionnaire. L'anthologie de l'humour noir d'André Breton a été censurée par le régime de Vichy.

 

Vivre en se prenant au sérieux, c'est un signe de bêtise.

 

Pourquoi, en vieillissant, certains hommes perdent-ils le sens de l'humour ? Parce que la mort... ce n’est pas de la rigolade ? Pourtant  fin de vie... rime avec trêve de plaisanterie ou fin de partie ?

 

Pourquoi dit-on que les femmes ont moins d'humour que les hommes alors que tant de femmes sont séduites par des hommes plein d'humour ?

 

La vie est absurde, cocasse, tragique... les meilleurs humoristes sont ceux qui se gaussent de cette absurdité.

Sans doute pour ça que je suis si fan de Woody Allen...

 

Le décalage entre le sérieux du quotidien et l'absurdité de l'existence a une force comique incomparable, qui aussi nous apaise, nous rassure...

 

"L'homme souffre si profondément qu'il a dû inventer le rire. "

 Friedrich Nietzsche

 

"Le rire n'est jamais gratuit : l'homme donne à pleurer mais prête à rire."

Pierre Desproges 

 

 Savoir illustrer ce décalage, par le détournement des mots, des gestes, des situations.. c'est la principale clé du ressort comique.

 

"On dit toujours : lent comme un escargot !

C'est bête! L'escargot ne marche-t-il pas ventre à terre? "

Alphonse Allais

 

J'admire les funambules des mots, ceux qui jonglent avec la syntaxe et illuminent les verbes...

Parmi eux,  Raymond Devos est immense.

 

Il nous parle de tout, de rien, à tout propos, et hors de propos, comme certains politiciens... mais lui joue carte sur table...

 

"Vous voudriez que je fasse comme tout ceux qui n´ont rien à dire et qui le garde pour eux ? Eh bien non !  Mesdames et messieurs, moi, lorsque je n'ai rien à dire, je veux qu'on le sache !"

 

… contrairement à ce qu'il dit :

 

" Quand j'ai tort, j'ai mes raisons, que je ne donne pas. Ce serait reconnaître mes torts !!!

J'ai raison, non ?"

 

Mais Devos sait que quand on parle à tort et à travers, il faut faire court. Il invente la chanson la plus courte de l'histoire :

 

"Se coucher tard... Nuit !"

 

En deux phrases et peu de mots, Devos sait aussi résumer toute une vie :

 

"Ma femme et moi, quand on s'est connu, on était tellement timides tous les deux, qu'on n'osait pas se regarder ! Maintenant, on ne peut plus se voir !"

 

Alors on va voir ailleurs et ça nous met sans dessus dessous :

 

"La femme du dessous est tombée amoureuse de celui du dessus...
Alors là dessus...quelqu'un est-il allé raconter à celui du dessous qu'il avait vu sa femme bras dessus, bras dessous avec celui du dessus ?  

Toujours est-il que celui du dessous l'a su !

Et un jour que la femme du dessous était allée rejoindre celui du dessus, comme elle retirait ses dessous, et lui ses dessus...

Je l'ai su parce que d'en dessous, on entend tout ce qui se passe au dessus...

Bref ! Celui du dessous leur est tombé dessus !

Comme ils étaient tous les deux saouls, ils se sont tapés dessus ! Finalement, c'est celui du dessous qui a eu le dessus !"

 

Dans cette vie, tout le monde court... Mais après qui, après quoi ?


"Dites-moi...  pourquoi tous ces gens-là courent-ils comme des fous ?",

Il me dit : "Parce qu'ils le sont !"

Il me dit : "Vous êtes dans une ville de fous ici...vous n'êtes pas au courant.",

Je lui dis :"Si, Si, des bruits ont couru !",

Il me dit : "Ils courent toujours !",

Je lui dis :"Qu'est-ce qui fait courir tous ces fous ?",

Il me dit : "Tout ! tout !

Il y en a qui courent au plus pressé. D'autres qui courent après les honneurs... Celui-ci court pour la gloire... Celui-là court à sa perte !"

 

Devos dit, comme le Christ : heureux les simples d'esprit. Il y a des imbéciles heureux, eux seuls sont lucides :

 

"Dernièrement,
j'ai rencontré un monsieur
qui se vantait d'être un imbécile.
Il disait :
"Je suis un imbécile ! "
Je lui ai dit :
"Monsieur ... c'est vite dit ! "
Tout le monde peut dire :
"Je suis un imbécile !"
Il faut le prouver !
Il m'a dit :
"Je peux ! "
Il m'a apporté les preuves de son imbécillité avec tellement d'intelligence et de
subtilité
que je me demande s'il ne m'a pas pris
pour un imbécile !"

 

On sait bien qu'entre le fou (loufoque) et le génie il y a peu de différence :

 

" Mon médecin : "Vous avez un chromosome en plus...",

Je lui dis : "C'est à dire ?"

Il me dit : "Que vous avez une case en moins !"

 

Qui suis-je en effet ?

Qui est l'homme, qui est le chien ?


" Moi, la première fois que j'ai entendu mon chien parler, j'aime mieux vous dire que j'ai été surpris ! C'était un soir, après dîner.
J'étais allongé sur le tapis, je somnolais... Je n'étais pas de très bon poil !
Mon chien était dans mon fauteuil, il regardait la télévision...
Il n'était pas dans son assiette non plus ! Je le sentais ! J'ai un flair terrible..."

 

C'est souvent la bêtise des hommes qui crée le doute sur l'identité :

« Pour l’instant, je suis un savant allemand, mais si je viens à devenir une bête noire, je serai un juif suisse »

disait Einstein...  un génie qui n'était pas fou…

 

Il présentait parfois sa théorie de la relativité ainsi :

 

« Si la relativité se révèle juste, les Allemands diront que je suis Allemand, les Suisses que je suis citoyen Suisse, et les Français que je suis un grand homme de science.

Si la relativité se révèle fausse les Français diront que je suis Suisse, les Suisses que je suis Allemand et les Allemands que je suis juif. »

A. Einstein, Comment je vois le monde  

 

 Mais non Albert, depuis 1968, “nous sommes tous des juifs allemands”... (ou bien des musulmans français) !

Il n'y a que les Besson, Sarko et autres Le Pen pour ne pas s'en souvenir !

 

Albert, encore un sacré comique (sauf quand il écrit à Roosevelt) et pas seulement quand il tire la langue !

Ne disait-il pas :

 

« Si un homme peut éprouver quelque plaisir à défiler en rang aux sons d’une musique, je méprise cet homme… Il ne mérite pas un cerveau humain puisqu’une moelle épinière le satisfait. »

 

Mieux vaut en rire en effet !

 

« L’ironiste humorisant [...] fait semblant de nous mystifier, car il simule la simulation »

Vladimir Jankélévitch, L'ironie

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« J'ai le pied gauche qui est jaloux du pied droit. Quand j'avance le pied droit, le pied gauche, qui ne veut pas rester en arrière… passe devant… le pied droit en fait autant… et moi… comme un imbécile… je marche. »